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[Soutenance de thèse] Gaetan Naulleau

Gaetan Naulleau soutiendra ce samedi 25 Janvier 2025 sa thèse de doctorat, “L’ordre du chant divin : polyphonies, orgue et plain-chant à Notre-Dame de Paris et dans les grandes églises séculières de France,1500-1800”, réalisée sous la direction de Philippe Vendrix. La soutenance se tiendra au Centre d’Études Supérieures de la Renaissance de Tours, en salle Rapin, à 14h. 
Les différentes sortes d’ornements musicaux déployés dans la liturgie, en complément du plain-chant et de la psalmodie, ont suscité d’innombrables travaux : les compositions polyphoniques, les improvisations polyphoniques et les interventions de l’organiste ont été envisagées indépendamment les unes des autres. Si des interactions occasionnelles ont été relevées, la façon dont ces éléments se trouvaient habituellement combinés au sein du cérémonial appelle une investigation plus générale de leur organisation codifiée – ce qu’un règlement parisien de 1711 désigne joliment comme « l’ordre du chant ».
La question première se ramifie indéfiniment. Quels éléments liturgiques étaient susceptibles d’être réalisés en faux-bourdon ? Fréquemment ? Quid du chant sur le livre ? Jusqu’à quel point les usages différaient-ils d’un lieu à l’autre (usages spécifiques) et d’un jour à l’autre (hiérarchies liturgiques) ? Sur quel tronc commun ? À quel agencement se rapportent les mentions de messes « avec orgue et musique », nombreuses au xvie siècle ? Autrement dit, comment les improvisations de l’orgue, les sections de musique figurée et de chant sur le livre étaient-elles disposées depuis l’introït jusqu’au Deo gratias ? Plus généralement, à quelle fréquence la messe bénéficiait-elle de musique ? Autant d’interrogations qui sont loin d’être secondaires dans la compréhension des pratiques musicales liturgiques, et que la segmentation traditionnelle des champs de spécialité a mises à l’écart.
Notre travail, qui s’étend depuis le début du xvie siècle jusqu’à la fin du xviiie, considère les églises séculières françaises disposant à la fois d’un chœur polyphonique et d’un orgue, à savoir quasiment toutes les cathédrales, certaines collégiales et certaines Saintes-Chapelles. L’« ordre du chant » s’y trouve principalement renseigné par des textes normatifs, les seules sources livrant un tableau complet des usages musicaux, sur lesquels une partition, un contrat d’organiste, un directoire, une relation publiée dans un journal ou un procès-verbal n’ouvriront jamais que des fenêtres étroites. Une cinquantaine de cérémoniaux et d’ordinaires, manuscrits et imprimés, exposent avec précision les pratiques musicales de près de trente églises. Un examen analytique et sériel, nourri à chaque étape de sources secondaires, lève le voile sur la distribution complexe des ornements musicaux. Leur quantité distingue les occasions plus ou moins solennelles, et leurs natures contrastées (polyphonies homophones ou sinueuses, improvisées ou composées, instrumentales ou vocales, intégrant le plain-chant ou non) rehaussent le déroulement d’une dramaturgie liturgique fondamentalement diversifiée.
Comme attendu, les normes sont loin d’être universelles. Les usages constatés dans trois des principaux sanctuaires parisiens présentent des divergences notables, et de même les quatre églises lorraines étudiées. La place accordée au chant polyphonique varie largement. Sa quantification, possible en croisant calendriers liturgiques et textes normatifs, est l’un des fils rouges de l’étude. Il a été possible à trois reprises de comparer les musiques produites pour une église aux normes locales.
L’identification des normes locales révèle a contrario des constantes parfois surprenantes. Elle met en question les formes d’alternatim définies comme primordiales dans l’historiographie et identifie l’agencement des messes « avec orgues et musique », documenté à partir des années 1620 et vraisemblablement normalisé beaucoup plus tôt. La partie consacrée à Notre-Dame de Paris, la plus développée, tient une place particulière dans cet ensemble. Aucun règlement local ne livre des informations aussi complètes que les cérémoniaux d’Arles, Beauvais, Besançon, Chartres…, mais une documentation profuse permet de reconstituer, pas à pas, une image kaléidoscopique des usages musicaux à Notre-Dame, dans toute leur spécificité.